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Francis Ley, "Madame de Krüdener et son temps", 1962

mercredi 18 février 2015, par Guillaume Gros

Collection "Civilisations d’hier et d’aujourd’hui" dirigée par Philippe Ariès chez Plon [1953-1961]

Francis Ley, Madame de Krüdener et son temps : 1764-1824, lettre-préface d’Alphonse Dupront, 1962, 646 p. [Prix Broquette-Gonin, de l’Académie française, 1963].

Présentation de l’éditeur

Le personnage de Mme de Krüdener permet de comprendre comment on passe de l’Europe des Lumières du XVIIIe siècle à l’Europe religieuse et mystique du romantisme. La baronne commence sa vie à la manière de Mme de Staël (qu’elle a connue), de tant d’autres femmes de la grande société cosmopolite de langue française ; elle la termine comme une illuminée, dans la pauvreté et la persécution. Inspiratrice d’Alexandre Ier et de la Sainte-Alliance, la voici poursuivie par les polices d’État en État, comme une aventurière. Telle est cette vie de contraste, à la charnière de deux mondes.
Francis Ley est un descendant direct de Mme de Krüdener. A ce titre, il disposait d’archives familiales, de lettres, de journaux de Mme de Krüdener et de sa fille, dont une grande partie inédite.

Présentation de l’auteur

La carrière d’historien de Francis Ley est assez particulière, car il a emprunté la méthode à ses maîtres et les sujets à sa famille : il a consacré sa thèse de doctorat es lettres à l’un de ses aïeuls, le maréchal de Münnich, seul témoin parmi les collaborateurs de Pierre le Grand à la cour de Catherine II. Il possède sur Mme de Krüdener une abondante documentation de lettres et de journaux intimes, demeurée inédite.
C’est principalement à l’aide de ses sources familiales qu’il a écrit cette biographie de son ancêtre, Mme de Krüdener.

Lettre-préface d’Alphonse Dupront (4e de couverture)

« Julie de Krüdener : un simple trait d’union entre le “siècle des lumières” et la “lumière de Vérité” du réveil religieux de la Restauration ? En réalité cette femme nordique, mitigée de slave, fut l’un des chaînons qui reliaient alors l’Europe de l’Est à notre Occident. Descendante des Chevaliers Porte-Glaive, arrière-petite-fille d’un maréchal et premier ministre de Russie, fille d’un grand seigneur balte, mariée trop jeune à un homme deux fois plus âgé qu’elle, Julie de Vietinghoff, baronne de Krüdener, parcourt d’abord l’Europe de la fin du XVIIIe siècle, celle des cours, des salons et des hommes d’esprit, mais aussi celle des paysages « sauvages » , des passions exaltées et des affectations de simplicité.

Retournée dans sa Livonie natale, Julie y rencontrera la foi vivante au Christ. Le spectacle des mourants d’Eylau (1807) lui donna la certitude que seule la paix de Dieu était juste, et que les hommes s’entre-tuaient sous l’impulsion satanique de l’Antéchrist. Elle s’attacha dès lors à convertir les princes, afin que s’instaure la paix du Christ glorieux. Elle prêcha la reine Louise de Prusse, la reine Hortense de Hollande, l’impératrice Élisabeth de Russie, et fut aussi l’amie du mystique, Jung Stilling et du pasteur Oberlin. Après avoir identifié Napoléon à l’Antéchrist, elle désigna le tsar Alexandre, son empereur vénéré, comme l’ « Élu de Dieu », le conducteur des peuples, et le libérateur de l’oppresseur. Des extraits de journal intime apportent un éclairage nouveau sur ses relations avec le tsar. Elle suivit Alexandre à Paris après Waterloo (juin 1815), y ouvrit un salon mystique où se pressa toute l’Europe d’alors, depuis le baron de Stein, Metternich, Capo d’Istria, Chateaubriand, Benjamin Constant jusqu’à la duchesse de Duras, Mme de Genlis et Mme Récamier ! Puis elle conjura le tsar de renouveler avec ses frères d’armes l’hommage des trois mages ; la fameuse « Sainte-Alliance » en naquit.

Partie seule sur les chemins de l’Europe, elle prêcha les foules en Suisse, en Allemagne, dans les pays baltes, jusqu’aux bords de la Neva ; elle les exhortait à se rassembler dans une vaste Sainte-Alliance des peuples. Soulevée d’enthousiasme au moment de la révolte des Grecs, elle prêcha ouvertement la croisade en leur faveur, allant même jusqu’à demander la libération du Saint-Sépulcre. Le tsar Alexandre se prononça contre les Grecs et exila Julie de Krüdener, qui alla mourir en Crimée (1824) au milieu de colonies chrétiennes venues là pour convertir les Tartares.

Avec Mme de Krüdener, le « pur amour » de Fénelon parcourut l’Europe de son temps. »